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A Saint-Denis, l’endroit est calme, épargné grâce au canal de l’agitation de la ville, les arbres fruitiers poussent devant la fenêtre, Anne van der Linden ouvre la porte de son atelier dont s’échappe un chat. Sous les toits, les œuvres s’empilent et révèlent une palette émotionnelle violente, qui fourmille de corps, et exprime de la plus sereine jouissance à la brutalité la plus crue, dans l’excès des pulsions qui sèment ici l’angoisse, ici l’horreur, ici le bonheur. Une vulve s’ouvre dans les plis d’un homme enturbanné. Une Pietà recoud son homme sur le canapé du salon à la lueur d’un abat-jour. Les siamois hermaphrodites fusionnent les corps dans l’amour, les squelettes et la mort s’en mêlent et lèchent une femme consentante. Deux vieilles ceinturées de dynamite menacent de tout faire sauter. Le sexe d’un homme s’enroule autour du buste d’une femme, en symétrie, les membres de l’un et de l’autre recréent la svastika. On se retourne sur le petit brin de femme qui nous accueille avec douceur, dont la sensibilité et la générosité contrastent avec les figures géantes qui s’imposent derrière elle et les mutilations qu’elle fait subir aux corps sur les toiles. L’œil plonge dans cet univers peuplé, le cerveau encore engourdi par l’appel de tous ces personnages, qui semblent exiger qu’on les écoute. Mais rien dans le sourire de Anne ne permet de débusquer l’origine de cette énergie explosive qui habite chacune de ses œuvres, celle qui saisit, qui interpelle tous les regards, même les plus réticents, qui rend sensible l’expérience et la rencontre avec cette peinture, sans échappatoire possible. A 55 ans, l’artiste n’en est pas à son coup d’essai. Depuis toujours elle dessine, et depuis toujours elle ne conçoit pas autrement le dessin que comme une improvisation, une projection d’elle-même et de son rapport au monde. Elle commence à griffonner sur des coins de tables à l’adolescence, puis encouragée par ses proches, elle intègre les Beaux-arts de Paris, dont l’académisme aura raison de sa formation, qu’elle quitte au bout d’un an et demi. « Les Beaux-arts étaient alors à l’opposé de ce que j’avais besoin d’exprimer. J’ai surtout décidé de partir, quand j’ai compris que les cours finissaient pas m’inhiber totalement. Pour moi créer vient des tripes, il n’y a rien de théorique, et la réflexion peut s’avérer paralysante, au contraire le laisser aller génère les images, et permet l’exploration intime des pulsions et des sentiments. » Autour des squats et des milieux alternatifs, Anne hésite alors, elle se cherche et se lance dans la peinture, découvrant un nouveau rapport avec la matière et la couleur, elle choisit la voie de l’abstraction. « En réalité, je me suis un peu perdue dans la recherche de la pureté formelle et peu à peu j’ai éprouvé le besoin de réintroduire des figures, des narrations, de raconter mes histoires. Aujourd’hui en revanche, toutes mes peintures proviennent de dessins préparatoires, ce qui ne m’interdit pas d’introduire des éléments que m’inspire la couleur. Il y a dans la peinture, une dimension peut-être plus jouissive, plus enveloppante qui enrobe les formes par la matière comme le prolongement organique de l’ossature un peu sèche du trait et du dessin». Au gré des rencontres, la peintre invente son langage graphique et pictural. Elle collabore avec de nombreuses revues et travaille notamment sur l’érotisme féminin avec une poétesse australienne, June Shenfield. Elle réalise également des décors de théâtre, pour les opéras « porno-sociaux » de Jean-Louis Costes. « Je tisse concrètement mes représentations avec les hasards de la vie. Il n’y a aucune règle concernant l’origine d’une histoire, l’événement le plus anodin, l’actualité la plus lointaine, les images, les souvenirs, les occasions et les circonstances, peuvent me lancer sur de nombreuses thématiques. » La mise à nu des résonance intérieures Les influences se superposent, cohabitent. Les peintures s’incarnent et modélisent dans le travail formel. Les mises en scène et les compositions empruntent à la renaissance italienne ou flamande, transposent des symboles et des motifs universels dans la recherche d’harmonies ou de ruptures graphiques, à travers le jeu des métamorphoses qui fusionne ou tronçonne les corps. Comme dans la réinterprétation du tableau de Rembrandt, La leçon d’anatomie du docteur Tulp, où des femmes assistent à une dissection, le spectateur semble assister à la dissection de tous ces personnages, une anatomie des désir et des fantasmes qui oscillent entre l’amour et la mort. Une femme dans son cercueil navigue à vue entourée de tous les autres êtres qui ont peuplé sa vie. « Mes influences sont très nombreuses, ça passe par la peinture, les gravures anciennes, mais également par toutes sortes d’images, comme ce livre sur les ânes, dont j’avais commencé à reproduire les photos, et qui a été à l’origine de toute une série. La mythologie également m’a toujours passionnée. Enfin il est évident que s’il n’y avait pas eu le surréalisme et l’expressionnisme, je ne peindrais pas comme je le fais. Pourtant, l’essentiel n’est pas là, pour moi l’art est l’expression d’un monde intérieur, et provient de la nécessité de donner à voir sa version des faits. Je ne me suis jamais sentie vraiment intégrée et j’ai besoin de comprendre ou du moins d’exprimer cette dissonance sociale, de témoigner du rapport à l’autre, en montrant la brutalité et la violence des sentiments. Ce n’est pas tant la nudité qui m’inspire mais la mise à nue des affects, de toutes les pulsions, le collage graphique permet de condenser tous ce qui compose la complexité d’une personne. » Eplucher les différentes couches de personnalités, révéler l’omniprésence du corps derrière les rôles empruntés aux situations ordinaires, la palette traduit les mystères de l’altérité. Le visage d’Anne s’illumine d’une étrange force. Quand elle referme la porte sur son univers, on comprend enfin la force de son envoûtement, car les images restent, gravées dans la mémoire, prêtes à hanter et à ressurgir, en écho à nos propres affects. Lucie Servin -Le calamar noirThèmes : Arts plastiques, Peinture
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1 - Ecce homo 1 2014
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2 - Ecce homo 2
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3 - Ecce homo 3
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Livre d'artiste, texte manuscrit de Christophe Comentale, dessins sérigraphiés et tamponnés de Anne van der Linden sur cahier chinois, couverture toilée, 9 exemplaires.Thèmes : Arts plastiques, Peinture -
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1 - dessin bâtard1
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2 - dessin bâtard 2
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3 - dessin bâtard 3
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Sortie du port-folio "Dessins bâtards" par Anne van der Linden et Placid - treize sérigraphies en deux couleurs au format A3 tiré à 130 exemplaires par Mathieu Desjardins des éditions MéconiumThèmes : Arts plastiques, Peinture -
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1 - Amour siamois 2013
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2 - Pinces à linge 2013
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3 - Leçon d'anatomie pour dames 2013
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Mon livre "Carnage intime"vient de paraître aux éditions United dead Artists, 60 pages de peintures et dessins réalisés entre 2006 et 2014 - impression offset quadrichromie sur papier Rives, dos carré, 26 X 17 cm.Thèmes : Arts plastiques, Peinture -
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1 - Grand-père 1 2013
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2 - Grand-père 4 2013
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3 - Grand-père 5
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J'ai réalisé les illustrations du livre Grand pere ed eretic-art, edition de luxe du roman culte de Costes publié par Fayard en 2006, format 16cm x 24cm, 256 pages, tirage limité de 1000 exemplaires numérotés et signés, préface de Raphaël Sorin, design inspiré des livres d'aventures illustrés du 19eme siècle, 16 illustrations noir et blanc, une par chapitre, et une sérigraphie, frontispice dessiné à l'ancienne, et 16 lettrines, couverture cartonnée en Baladek Istrana, avec titres et dessin en dorure à chaud.
Sortie du livre le 15 mars pour la clôture de mon exposition à la galerie La belle époque, 17 bis chemin des Vieux Arbres, 59650 Villeneuve d'Ascq (Lille)
Thèmes : Arts plastiques, Peinture -
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Si l'on considère l'ensemble de votre œuvre, ce qui frappe, outre votre prolificité sur tous types de supports, c'est que vos toiles ne perdent pas en force. Sont-ce toujours les mêmes questions qui vous animent depuis trente ans que vous peignez ?Anne Van der Linden : Quand je travaille je ne me pose pas de questions auxquelles l’image pourrait répondre, les formes et les idées se mettent en place à partir d’une impulsion, d’une poussée d’énergie, à moi d’être opportuniste par rapport à ça pour faire évoluer l’image. Du coup il faut que je soie effectivement en bonne forme pour travailler, sans force pas de création, et ça c’est une constante. D’ailleurs je ne sais pas ce que ça donnera au fil du temps, si en continuant à vieillir j’arriverai encore à travailler.Une autre constante est que les images ont toujours eu un rendu très dense, très lourd, elles sont excessives, elles sautent à la gueule. C’est mon truc, je suis structurée ainsi. Pourquoi avoir fait le choix de rester en région parisienne pour travailler ? N'auriez-vous pas plus de tranquillité et d'espace pour peindre dans un endroit plus reculé ?Ce n'est pas un choix mais une facilité, j'ai un logement gratuit ici. Aussi c'est plus facile en étant près de la ville de montrer et vendre mon travail, je connais les réseaux, comment trouver facilement quelques sous. Les gens hésitent déjà à venir jusqu’en banlieue voir mon boulot, les faire venir à la campagne me paraît impossible, même si l’idée est plaisante. De toutes façons je crois que je pourrais travailler n'importe où, peu importe l'endroit, mon atelier est nulle part. Vous avez une sensibilité littéraire toute particulière, songiez-vous à devenir écrivaine quand vous étiez jeune ? Quand et comment les moyens d'expression picturaux ont-ils pris le dessus sur la langue ?Non je n'ai jamais pensé à devenir écrivaine, même si j’avais des facilités par ma formation. Les mots sont des codes communs très forts, trouver une formulation originale m’a toujours paru bien plus difficile qu'avec l’expression picturale. La fabrication d’images est venue assez tard, petit à petit. Je n’avais pas de talent particulier pour ça, j’avais juste l’envie de le faire, comme si je visitais des territoires vierges.Finalement le côté littéraire a été intégré dans l'image qui est devenue au fil du temps hyper narrative, blindée d'histoires. Qu'aimiez-vous dessiner quand vous étiez enfant et adolescente ?Enfant je dessinais des dessins d’enfant, rien de particulier, des voitures des maisons des églises.A l’adolescence j’ai fait des collages, des broderies, des sexes féminins qui ressemblaient à des algues, des bouches, des organes, ça commençait à être chaud ! Et puis je me suis mise à dessiner sur des coins de table des dessins très lâchés, un peu dans l’esprit des dessins automatiques surréalistes, un mélange de tracés aléatoires et de bouts de figures, humaine et animales, c’était très varié, selon mon humeur. Vous évoquez souvent vos difficultés à vous intégrer en société ; avez-vous toujours été de nature plutôt marginale ?A vrai dire je ne me souviens pas, je crois que non, je n’ai jamais été marginale de nature, les gens m’attirent au contraire, j’aime observer leurs comportements, j’essayer de comprendre leur principe, mais je préfère les mater à distance ! Peut-être qu’à un moment ça s’est mal passé et comme je m’occupe très bien toute seule, j’ai continué à faire comme ça pour avoir la paix.Il se trouve aussi que je n’ai pas suivi la voie de la socialisation, je n’ai pas de vie de famille, d’enfants, pas de boulot salarié… et la création est un truc de solitaire, c’est un statut idéal pour passer du temps seul sans avoir de comptes à rendre. Racontez-nous votre passage succinct par les Beaux-Arts. Y avez-vous appris quelque chose ?J’y ai donc appris que je ne pouvais pas travailler avec du monde autour de moi. Et aussi que les étudiants mâles étaient des gros machos. Et enfin que mes dessins perso étaient mal vus par les « autorités locales », considérés comme des petites fantasmes à écarter. Pourquoi avoir tout de même décidé de faire des études d'arts plastiques après cette expérience ? Éprouviez-vous malgré tout un besoin de reconnaissance institutionnelle ?Je faisais pas mal de petits boulots (gardes d’enfants, travail en imprimerie, vendeuse) et je me suis dit que je pourrais peut-être gagner ma vie plus facilement avec un diplôme. Là encore j’ai laissé tomber (finalement j’ai toujours tout laissé tomber sauf la peinture) et bien m’en a pris car je supporte mal le bruit des classes, et je me serais sans doute retrouvée prof d’arts plastiques en banlieue, arrrgh !! Vous avez un style très reconnaissable et relativement inchangé depuis au moins 10 ans. Quel chemin avez-vous parcouru jusqu'à en arriver là ? Avez-vous, à un moment, remis en question la représentation figurative ?Je suis passée par une période abstraite, je voulais trouver une expression pure, mais ça a foiré, je me suis embourbée dans la matière, d’ailleurs j’ai tout jeté, c’était vraiment le chaos, et les figures sont venues remettre de l’ordre et des directions dans mon travail. Depuis je n’ai pas fait autre chose effectivement. Vous avez partagé pendant une dizaine d'années la vie de Costes. Cette cohabitation a-t-elle influencé votre art ?J’ai fait une revue avec lui dans les années 80, La vache bigarrée, ma première expérience d’édition en ronéo, textes et images, qui a été l’occasion d’une ouverture sur l’underground, la création alternative. Ensuite j’ai joué et fait des décors dans ses spectacles, alors oui c’est une influence, une fréquentation artistique de très longue date. Avez-vous des rituels, des habitudes avant de commencer à travailler ?Rien de spécial vraiment, je change de fringues, je prépare la peinture, j’allume parfois la radio et j’y vais. Vos toiles et dessins regorgent de corps désarticulés, mutilés, écorchés. Quel rapport entretenez-vous avec votre propre corps ?Le corps doit être sous contrôle permanent, on peut fermer sa bouche sur ses pensées, mais le corps lui, difficile de le brider et pourtant c’est ce qui est demandé en permanence, avec la souffrance qui en découle. Je parle de ça je crois.Ceci dit je ne pratique pas l’auto-mutilation ni la torture. Je fais même du footing!. Mais pour visiter les mondes intérieurs, un bon moyen est d’y aller au couteau et à la hache. La nudité est chose normale dans votre œuvre, les excréments un artéfact parmi d'autres ; avez-vous des tabous ? Vous êtes-vous jamais interdit de représenter des choses ?La nudité et la merde sont notre quotidien, et je n’ai aucune sensation de transgression en parlant de ça, il suffit de déconstruire les codes sociaux, et tout devient bien plus simple, plus gai. Quant au tabou ultime, il m’est arrivé d’être mal à l’aise avec une de mes représentations en cours, et finalement ça donnait une bonne toile ! Parce que l’enjeu n’est pas dans les idées avancées mais dans ce jeu de matière couleur pensées qui font de la toile un organisme avec ses propres règles. Qu'est-ce que la vulgarité, pour vous ?Ce qui est éloigné de la nécessité. Vous êtes très active dans le milieu de la micro-édition, vous éditez d'ailleurs votre propre revue, Freak Wave ; avez-vous découvert récemment des artistes qui vous parlaient tout particulièrement ?J’ai créé Freak Wave avec l’artiste Olivier Allemane, on a donné de l’espace à des expressions qui nous paraissaient non consensuelles, non policées, avec un goût particulier pour la peinture parce que nous sommes peintres tous les 2 et que c’est un médium qui a été ringardisé par le discours dominant, donc d’autant plus intéressant à remettre en scène. Je pourrais vous citer des tas d’artistes, de tous les coins du monde, de Greg Jacobsen à Joan Cornella, Sue Coe, Antoine Rigal, Chantal Montellier, la liste est longue des artistes dont le travail m’émeut, par la forme et par l’esprit.Thèmes : Arts plastiques, Peinture
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Réalisation d'une sculpture in-situ (Juin, Juillet, Août 2015) pour exposition permanente.
LE CHATEAU DES PÈRES. 35150 - Piré sur Seiche. http://www.chateaudesperes.frThème : Arts plastiques -
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Serie de "petites sculptures". 2015.
Thème : Arts plastiques -
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Cyrille Weiner développe depuis 2001 un travail photographique décrivant des territoires contrastés, situés entre nature et constructions urbaines, ou abandon et restructuration de sites. Par l’observation de ces zones intermédiaires, il engage une réflexion sur l’occupation de l’espace et le temps de sa transformation; la façon dont l’individu s’y inscrit solitairement ou socialement, à la marge ou dans le cadre d’aménagement collectifs.
Ces situations géographiques « entre deux » sont également vécues comme des respirations, des moments où le tissu urbain et son lot d’activité s’interrompent, ouvrant un vide où les habitudes perceptives et l’appréciation des espaces sont bouleversés. Les photographies que Cyrille Weiner réalise sur ces territoires traversés à pied deviennent un support de fictions. Il encourage leur lecture ouverte, et déconnectée de leur contexte d’origine, en construisant des scénarios qui prennent la forme d’expositions mises en scène, de projets éditoriaux et d’installations. Dans le cadre du cycle d’exposition Code Inconnu, il concrétise un projet évoqué depuis longtemps avec le designer Grégory Lacoua : concevoir un objet photographique hybride, à mi-chemin de la sculpture et du mobilier. Tous deux s’intéressent à la possibilité d’enrichir une relation au monde par la création d’objets et de situations dont l’identification incertaine appelle des usages inédits et ravive l’implication du corps et du regard.
Trois photographies de Cyrille Weiner sont ici transférées sur des plaques de verres. Placées les unes derrière les autres, elles font apparaître un paysage flottant et poreux, à la fois naturel et urbain. Ce télescopage d’images rappelle l’effet de relief des anciennes stéreoscopies dont la présentation publique était destinée à un usage collectif. L’ensemble construit un espace de projection à la fois dense et cristallin que le regard traverse, réajuste et reconstruit à sa guise.
MPThème : Arts plastiques -
Le tandem d’artistes Magali Daniaux et Cédric Pigot développe depuis plusieurs années une œuvre profondément polymorphe. De la sculpture à l’installation monumentale en passant par le collage, la poésie sonore, la fabrication d’odeurs ou la création numérique, leur œuvre ne connaît plus de frontières. Elle tend aujourd’hui à prendre une forme de plus en plus immatérielle pour embrasser des sujets qui s’articulent autour d’une réflexion anthropologique sur l’habiter et sur la marchandisation du vivant.
Projeté pour la première fois en grand format, leur oeuvre 78°55’N s’inscrit dans un projet d’envergure mené depuis 2010 en Norvège, autour du Global Seed Vault, une banque stockant des graines de culture vivrière en provenance du monde entier. Ils identifient, sondent et délivrent les enjeux de ce “back up de la dernière chance” au fil d’une enquête de terrain mixant approche documentaire et science fiction. Ce projet intitulé “Devenir Graine” a pris la forme d’une plateforme éditoriale numérique accessible sur http://devenirgraine.org et http://lo-moth.com.
Volet le plus contemplatif de ce projet, 78°55’N nous immerge dans un paysage de fjord et de glaciers filmé en temps réel à Ny Alesund. 78°55’N correspond à la localisation géographique de cet endroit habité le plus au Nord du monde où se trouve une Station de Recherche Internationale. Les visiteurs sont invités à contempler cette nature intouchée, à confronter leur temporalité à celle, très lente, d’un paysage désertique, quasi statique, évoluant imperceptiblement au fil des heures, de la lumière et du passage des oiseaux.
Le collectionneur souhaitant ouvrir un mur de son habitation sur ce paysage en changement constant obtiendra l’adresse Internet lui permettant d’y accéder. Les artistes interrogent la portée de cet acte : “Serait-ce une manière ultra-contemporaine de vendre du foncier dématérialisé ? Est-ce le premier pas vers une sorte de “viewshare” en référence au “timeshare”, pratique immobilière qui a explosée dans les années 80 ? Ou un accès en direct, 24h/24, au spectacle du réchauffement climatique, la fonte des glaces en Arctique ?”
Le soir du vernissage, Hymn to the night, une performance sonore accompagnera la tombée de la nuit sur ce paysage onirique.
Commissariat d'exposition et communiqué de presse pour la galerie laurent muellerThème : Arts plastiques