A ce titre, ses œuvres peuvent être considérées comme autant d'outils de lecture et d'interprétation de la réalité dans la diversité de ses manifestations. Qu'un Christ ou un Pinocchio trouvent à s'incarner dans un bois de bourdaine, une "mère d'artiste" dans un confit de canard ou une maison dans une plume d'oie sauvage, tout semble surgir avec évidence par la magie du lien, par l'activation d'une mémoire qui classe, associe et d'une main qui fait migrer les formes par un geste précis de découpe, d'extraction, de forage. Au-delà de la forme, c'est ce chemin du raccordement que partage Olivier Leroi avec le regardeur. Et si l'on s'accorde volontiers sur le fait que son travail est doté d'humour, ce dernier n'est pas une fin en soi, mais plutôt la conséquence heureuse d'une façon de voir qui fait jaillir un état singulier de présence aux choses.
L'œuvre d'Olivier Leroi est réjouissante à fréquenter parce qu'elle résiste à la banalisation croissante du monde, dans ses visions les plus communément partagées. Elle résonne singulièrement avec cette "économie de l'attention" qui d'après Yves Citton constitue aujourd'hui " la première rareté et la plus précieuse source de valeur". Si ce que nous croyons voir (et savoir) peut-être limitatif et rendre distrait, la conscience de ce que nous pourrions voir et de ce qu'il reste à savoir, augmente au contraire l'acuité de présence au monde et à soi.
Marguerite Pilven