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  • Jean Baptiste Para, Le temps et le lieu

    Il y a 14 ans

    / Publications / Textes d'auteur

    Jean Baptiste Para, Le temps et le lieu
    Jean Baptiste Para, Le temps et le lieu

    Avril 1994

    Que voit-on dans les photographies de Corinne Mercadier ? Le  ciel et l’eau, le trait de l’horizon, de frêles appontements aux planches disjointes, une ou deux barques tirées sur la grève, presque rien. Les objets n’étaient pas plus nombreux dans les toiles de Morandi. Des vases, des cruches, des bouteilles. Une égale persévérance dans le laconisme. Un art du peu où le terne et le  quelconque  deviennent le réel le plus radieux. Une figure de l’esseulement qui se métamorphose en extase de la solitude. Contre tout ce qui oblitère notre vision, Corinne Mercadier ouvre la voie du vide. Et ce vide étrangement attise une présence au monde. Il est la charpente et le gréement du regard. Peu à peu s’insinue en nous cet état d ‘abandon qui imprègne le paysage. Peu à peu se retranche tout ce qui n’est pas la lumière. Les rares objets que nous voyons vivent dans la vacance de leur usage.  Il y a en eux quelque chose d’infiniment disponible qui communique son accalmie et sa paix jusqu’aux abords du cœur. Les sites photographiés sont toujours les mêmes, jamais nommés. Ils sont inassignables, comme en marge de tout lieu, mais non pas nulle part. Il semblerait plutôt qu’ils étaient déjà  présents  en  nous   avant d’être aperçus de nous. « Chaque âme est et devient ce qu’elle contemple », affirmait Plotin.  Corinne Mercadier nous donne à contempler le peu. La merveille est que ce soit à lui seul une échelle d’intensités. Il  contient   l’inépuisable. Ces eaux dormantes ou sculptées par d’immobiles remous sont-elles celles d’un lac, d’un étang, d’une mer ? On songe à peine à se le demander. Quand la barque sur le sable ressemble à un os de seiche, elle signale une réduction à l’essentiel, un passage à l’extrême de la simplicité. S’éveille alors  la tentation d’inscrire cet art de la photographie à l’enseigne de l’haïku visuel. Comme les trois vers du poème japonais classique, chaque image évoque ici l’événement le plus ténu et le sertit dans la blancheur d’un silence.  Elle est un fragment isolé où l’univers se déchiffre et se recompose au fil de la contemplation. Voici un autre trait sensible de ces photographies : elles portent en elles l’amont de leur art, approchant parfois le grain et les bistres des plus anciens clichés ou des primitifs daguerréotypes. Quant à l’emploi de la couleur, on le devine soumis à une patiente décantation : les tons se patinent, s’enfauvent, se fanent, puis soudain se vivifient dans la stridence écarlate de trois fanions hérissés sur un esquif, parmi les filets de pêche et les flotteurs. Tout est affaire de lumière et l’on perçoit un accent pictural dans la clarté qui nous parvient, comme si la lumière se matérialisait en dématérialisant les choses. Peut-être serait-il plus juste de dire que Corinne Mercadier rend perceptible une part latente de la matière ? l’objet le plus humble, le spectacle le plus ordinaire, celui qu’avait effacé l’accoutumance, voici que nous le percevons d’un regard ému et neuf. Tout le visible se retrempe alors dans un air de légende, comme si se révélaient à nos yeux les villes d’Ys et de Kitège enfouies au fond des eaux. Dans la légère pulvérulence ou le flou qui marquent certaines photos, on devine pourtant un voile de mélancolie. Est-ce le regret de l’inaccessible ? Est-ce le tourment de ne pouvoir accorder une vie à cette lumière qui s’inaugure sans cesse et semble vouloir nous conduire au revers du temps, « là où il tremble et s ‘étale et renonce à filer»? Au plus profond de son être, l’homme croit alors traverser l’échancrure des jours, et dans une lueur indécise où l’aube ne se distingue plus du crépuscule, son œil étrenne à nouveau le monde.
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    Thème : Photographie
  • Vues d'expositions

    Il y a 14 ans

    / Photographies / Le huit envolé

    • 1 - Octogone funéraire de l'Hôtel-Dieu, Montmorillon, été, 2006
      Octogone funéraire de l'Hôtel-Dieu, Montmorillon, été,  2006
    • 2 - Dos du retable, Musée de la Roche-sur-Yon, 2007
      Dos du retable, Musée de la Roche-sur-Yon, 2007
    Thème : Photographie
  • Vues d'expositions

    Il y a 14 ans

    / Photographies / Longue distance

    • 1 - Le Havre sur commande et autres…Musée Malraux, Le Havre, 2010
      Le Havre sur commande et autres…Musée Malraux, Le Havre, 2010
    • 2 - Galerie Les filles du calvaire, 2007
      Galerie Les filles du calvaire, 2007
    Thème : Photographie
  • Présentation

    Il y a 14 ans

    / Photographies / Longue distance

    Regarder le monde familier de loin comme étranger. A longue distance du monde le plus proche. Filtrés par la mémoire, le temps ou l’effort de projection, lieux et personnages  sont figés dans la lumière lourde d’un présent éternel. Ici ? Copie d’ici dans un ailleurs pressenti ? Temps archaïque ou futur ? L’univers de ces images se rapporte au théâtre : la lumière travaillée, dramatique, traite les scènes extérieures comme des intérieurs. Ces photographies jouent avec un monde vitrine du rêve, une Terre espace expérimental où se projettent des fictions vraisemblables. Mais la série Longue distance est aussi liée à l’espace/temps cinématographique: j’ai le sentiment permanent par la photographie d’extraire quelques fragments d’un film qui s’échappe sans cesse. Les images deviennent suite de photogrammes plus ou moins discontinue. De ce fait, la plupart se présentent en triptyque ou en diptyque. C’est aussi ce qui a déterminé le format rectangulaire. Après Une fois et pas plus, et La Suite d’Arles, de nouvelles sculptures apparaissent dans Longue distance. Elles n’ont plus à voir ni avec le vêtement ni avec le livre. Qu’elles apparaissent comme dessins rigoureusement géométriques ou feuilles d’or chiffonnées par un lancer, elles condensent la possiblilité de la photographie, et la capturent de l’intérieur.
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    Thème : Photographie
  • Longue distance

    Il y a 14 ans

    / Photographies

    • 1 - Années-lumière
      Années-lumière
    • 2 - A revers
      A revers
    • 3 - Debout
      Debout
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    Thème : Photographie
  • Présentation

    Il y a 14 ans

    / Photographies / Le huit envolé

    Le huit envolé répond à une proposition d'exposition faite par l'association L'Empreinte, et la ville de Montmorillon, située entre Poitiers, Limoges et Châteauroux, au patrimoine roman et médiéval exceptionnel. Plutôt qu'une exposition classique, j'ai préféré travailler à partir du lieu-même, l'Octogone de Montmorillon, monument passionnant et magnifique.
    L’Octogone
    Ce monument funéraire du XIIème siècle, accolé à l’Hotel-Dieu, a perdu sa fonction première mais pas son lien avec l’imaginaire de la mort. Sans me référer au symbolisme religieux du 8, lié au baptême et à la résurrection, j'ai laissé libre cours aux sensations que l’espace, les formes, la lumière et les matériaux génèrent. Le plan octogonal mais aussi les hautes marches -extrados de la voûte de la crypte- constituant le sol de la chapelle, la matière de la pierre, m'ont menée vers un travail de recherche centré sur le lieu.
    Le retable
    La forme du retable, polyptyque posé, découle du lieu : l’autel s’impose dans l’Octogone comme espace de présentation privilégié, ultime scène dans ce lieu où les photos ont été réalisées. Les murs ne sont pas ici destinés à recevoir des images. J'ai par ailleurs souvent conçu mes pièces photographiques sous forme de triptyque ou de diptyque, par exemple dans La suite d’Arles, Une fois et pas plus ou Longue Distance. Le huit envolé est un véritable retable articulé, dont on fait le tour pour voir le dos, et tout en citant cette forme picturale utilisée du 13ème au 16ème siècle, il s’inscrit dans les retrouvailles de l’art contemporain avec un mode de présentation offrant de multiples lectures.

    Le huit envolé
    Face: trois photographies. Dos: écriture au crayon blanc sur fond noir.
    Le retable s’articule autour de trois éléments : le huit, l’infini, et la figure humaine. L’association des deux premiers termes intéresse les hommes depuis l’Antiquité. Le troisième terme, c’est lui-même, cet homme qui se pose des questions dont à mes yeux seul l’art console.  Le titre de l’exposition, Le huit envolé, évoque le huit couché, mort gisant. Devenu signe de l’infini, il s’évade des murs comme l’infini fait s’évader le huit de la suite des nombres. Le signe de l’infini, serpent qui se mord la queue, le renouveau, la vie qui reprend. Cet élan que donne le personnage en plein envol dans le panneau droit. Les signes huit blanc et infini noir sont des sculptures réalisées pour les prises de vue, deux grands rubans de carbone et tissus. Là aussi, j'ai continué le travail entrepris dans mes récentes séries, qui mêlent décors, personnages réels et objets fabriqués. L’idée de travailler sur le corps en mouvement m'a menée naturellement à collaborer avec une danseuse : avec Anne Laurent s’est déroulé un travail sur les sensations et les gestes liés à l’idée d’échapper, de lutter et de s’envoler. Lorsqu'on fait le tour du retable , on découvre un texte déployé sur les trois panneaux du dos. Autour d'une phrase centrale (S'évader de la suite des nombres) se croisent d'autres mots, multipliant les assemblages et interprétations.

    Carnet de travail
    J'ai réalisé pour l'exposition un fac-similé de mon carnet de travail : plans, dessins, textes, photographies préparatoires, montages... permettent de suivre le déroulement de la recherche, les choix, jusqu'à la pièce définitive. Au cours de sa lecture on retrouve le dos du Jardin des délices de Jérôme Bosch, La Jetée de Chris Marker, La Neuvième Elégie de Rilke.
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    Thème : Photographie
  • Carnet

    Il y a 14 ans

    / Photographies / Le huit envolé

    • 1 - Carnet de travail P.2
      Carnet de travail P.2
    • 2 - Carnet de travail P.5
      Carnet de travail P.5
    • 3 - Carnet de travail P.10
      Carnet de travail P.10
    • + 1 media(s)
    Thème : Photographie
  • Présentation

    Il y a 14 ans

    / Photographies / La suite d'Arles

    Commande du Fond National d’Art Contemporain à l’initiative du Musée Réattu, d’Arles et exposée lors des Rencontres Internationales de la Photographie 2003, La Suite d’Arles est accompagnée d’un livre  du même nom aux éditions Filigranes. Le sujet de cette commande était la ville d’Arles. J’y ai trouvé un observatoire particulièrement bien placé pour voir : Un ciel envers de l'architecture, moulage immatériel de la ville minérale. Voir la lumière contrainte à la géométrie. Voir le vent en contact avec la pierre, voir la mémoire des pierres agitées par l'apesanteur. J’y ai fait voler des sculptures de papier et de tissus. Rubans comme des phylactères déployés dans les airs, noirs, blancs, sous-titrages ordonnés par les hasards du vent, textes mêlés aux photogrammes d’un film rêvé là. Annonciations obscures, images de la pensée en mouvement… Ou bien livres d’or, lancés dans ces espaces sacrés pour certains d’entre eux, comme une mémoire prise dans la forme. Les dix photographies de La Suite d’Arles sont très liées à la série précédente, Une fois et pas plus.
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    Thème : Photographie
  • Présentation

    Il y a 14 ans

    / Photographies / Une fois et pas plus

    Autour du corps et de ses enveloppes, peau, vêtement. Autour de la suspension, de l'apparition dans l'espace aérien et dans l'instant photographique. Lancé éphémère des objets devant l'objectif. Une fois et pas plus : Titre qui se répétant à haute voix que l'horloge est impitoyable, que l'attraction terrestre aussi, rêve leur relâchement. Des objets (je réalise ces sculptures) rencontrent des personnages, ou pas. Destin, futur. Ce qui arrive. Le réel est hasard, vitesse, mouvement. La couleur, si importante dans les autres séries, est voilée pour ne pas troubler l'apparition distante du rêve : proche du noir et blanc, elle laisse se fondre l'objet volant dans le décor.
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    Thème : Photographie
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    Il y a 14 ans

    / Photographies / Glasstypes

    Polaroid SX 70  agrandis, les Glasstypes sont  des photographies d’objets peints sur verre, isolés sur un fond sombre. Objets incertains, leur usage, leur histoire et leur échelle échappent. Le corps est le principal repère : ils s’apparentent au vêtement, à l’abri, à l’objet quotidien, et le corps rayonne en son absence-même.La couleur, variation autour de l’éblouissement, plus que  pigmentation, plonge les photographies dans un bain froid ou chaud, irradié de lumière. Dreaming Journal, paru aux éditions Filigranes, accompagne ce travail. C’est un livre d’artiste qui met en parrallèle  photographies (Glasstypes, Intérieurs), et textes. Les évènements au fil des jours se mêlent aux rêveries, au travail en train de se construire.
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    Thème : Photographie